L'un des soucis que l'on peut rencontrer en intégrant des personnages dessinés à ses environnements, c'est que ceux-ci ne semblent pas à leur place. En cause, la réalisation indépendante des ressources graphiques et la nécessité de gérer divers paramètres liés aux lieux visités. Quelles sont les astuces pour réussir cette superposition de dessins donnant une impression d'homogénéité du rendu ? L'Atelier Sentô partage son expérience pour réussir les intégrations des personnages :
Jouer avec la perspective
A l'opposé d'une modélisation en 3D que l'on peut observer sous plusieurs angles, un personnage 2D possède un espace perspectif fixe. Notre but sur The Coral Cave, c'est de dessiner les scènes comme si nous étions sur place, carnet de croquis à la main. Mizuka est donc vue à hauteur d’œil : la ligne d'horizon est pile à la hauteur de son regard :
Là où ça se complique, c'est que chaque décor a également son propre espace perspectif. Et il est très rare que la ligne d'horizon du décor concorde avec celle du personnage. Si l'écart entre ces deux espaces est trop important, ils seront en contradiction et l'illusion sera brisée. Ce serait le cas si le décor était vu en contre-plongée, par exemple.
Le plus important, ce sont les pieds du personnage. Ils doivent avoir l'air posés sur le sol. Si c'est le cas, on peut se permettre quelques libertés avec la perspective. Certains décors sont vus depuis les airs et pourtant le personnage s'y intègre correctement. C'est la magie du dessin : on brouille les pistes, on crée un espace géométriquement faux qui semble cohérent.
Un problème de taille
Dans la plupart des jeux en 2D, les personnages ne se déplacent que latéralement. Au contraire, les jeux d'aventure proposent généralement une mise en scène cinématographique, avec de la profondeur et des angles de caméra variés. Le personnage peut être vu en très gros plan ou n'être qu'un point dans le décor. Bien entendu, on ne redessine pas le personnage à chaque fois qu'il change d'échelle. Il n'a qu'une taille et le logiciel se charge de le redimensionner en fonction de son éloignement. C'est pratique mais cela a une conséquence : plus le personnage est petit, plus son trait de contour est fin alors que les traits du décor gardent la même épaisseur.
Quand nous avons commencé à travailler sur le jeu, les plans étaient plutôt rapprochés donc nous avons dessiné le personnage avec un trait fin. Mais, au fur et à mesure que nous variions les cadrages, c'est devenu un problème majeur. Il a fallu redessiner le personnage avec un trait de contour suffisamment épais pour les vues éloignées mais pas trop pour les vues rapprochées.
C'est déjà mieux comme ça ! Mais à gauche, sur le gros plan, le trait du décor se retrouve trop fin à son tour. Soulagement, c'est le seul dans son cas. Quelques coups de crayons, on scanne et hop, le tour est joué !
C'est un travail d'équilibriste qui demande de nombreux tests avant d'obtenir un rendu cohérent en toutes circonstances.
Se fondre dans l'ombre
En fonction des scènes, de leur ambiance, du moment de la journée, l'éclairage change. Un décor de nuit, par exemple, sera teinté de bleu. Le personnage, lui, garde la même couleur : on ne va pas le redessiner à chaque fois que la lumière change. Au lieu de cela, on indique au moteur de jeu quelle couleur le personnage doit avoir en fonction de sa position dans un décor. S'il passe dans l'ombre, on le rend plus sombre, s'il s'approche d'une flamme, on lui donne une teinte jaune, … C'est la touche finale, le moment où le personnage se font parfaitement au décor.Si décors et personnages sont dessinés à part, il y a évidemment tout un travail d'homogénéisation. Il faut penser les décors en fonction du personnage et le personnage en fonction des décors. Le plus difficile, comme toujours, c'est de trouver une recette qui fonctionne dans des situations variées. Cela demande beaucoup de tests et de ratés. Mais quand on l'a trouvée, c'est un sacré soulagement !
Fil d'actualités
Sommaire
- Partie 1 - Présentation d'Atelier Sento
- Partie 2 - Premiers pas et prototype
- Partie 3 - Souvenirs d'Okinawa
- Partie 4 - Présentation du moteur Wintermute
- Partie 5 - Gérer les acteurs dans Wintermute
- Partie 6 - Guider le personnage
- Partie 7 - La mise en place des décors
- Hors série - Les jours où ça n'avance pas !
- Partie 8 - L'enregistrement des sons
- Partie 9 - Les énigmes
- Partie 10 - Les musiques
- Partie 11 - Communiquer en s'amusant
- Partie 12 - Un jeu made in tout le monde
- Partie 13 - Dans 60 ans...
- Partie 14 - Le scénario
- Partie 15 - L'intégration des personnages
- Partie 16 - Le regard des joueurs
- Partie 17 - Les variables
- Partie 18 - La traduction anglaise
- Partie 19 - En route pour 2016
- Partie 20 - Un chat pas comme les autres
- Partie 21 - La gestion de l'inventaire
- Partie 22 - La création de cutscenes
- Partie 23 - Faire bêta-tester son jeu
- Partie 24 - Interview de Nick Preston
- Partie 25 - Interview de Thorn
- Partie 26 - Anatomie d'une scène : l'idée de départ
- Partie 27 - Anatomie d'une scène : l'énigme
- Partie 28 - Anatomie d'une scène : le croquis
- Partie 29 - Rencontre avec le studio Ernestine – 1ère partie
- Partie 30 - Rencontre avec le studio Ernestine – 2e partie
- Partie 31 - Du papier à l'écran
- Partie 32 - L'école des fantômes
- Partie 33 - Développer un jeu avec des lycéens
- Partie 34 - Faire connaître son jeu
- Partie 35 - Sur les routes de France
- Partie 36 - Éloge des gribouillis
- Partie 37 - Un jeu dessiné par des enfants
- Partie 38 - La naissance d'un projet
- Partie 39 - Mélanger 2D et 3D
- Partie 40 - Adventure Creator
- Partie 41 - Designer des personnages
- Partie 42 - The Doll Shop
- Partie 43 - Donner de la profondeur
- Partie 44 - Des personnages en kit
Comments
Toujours agréable et franchement relaxant ! Merci à vous !
Toujours aussi intéressant, merci !
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