It's a lot harder to say "those kids didn't do that shooting at that school because of video games" when you have someone threatening to do a shooting at a school because of video games. Regardless of whether the threat was real or whether these two situations are really related, the rhetorical position becomes very difficult. So you've made it much harder to defend games in public discourse, bravo.
(Tweets publiés suite aux menaces envoyées cette semaine à l'Université d'Utah, où Anita Sarkeesian a dû annuler une conférence)
L'affaire mentionnée dans cette citation n'est pas le sujet du topic, mais elle constitue une introduction pertinente. Je souhaite en effet parler un peu de l'image négative des jeux-vidéo auprès du grand public, concernant notamment la violence. Les jeux-vidéo ont souvent été accusés d'encourager les comportement violents chez les jeunes, voire d'être la cause indirecte de séries de meurtres. Si ces stéréotypes se sont dissipés depuis quelques années, la violence nettement présente et réaliste dans les jeux récents encourage toujours certains à considérer les jeux comme des simulations de meurtres.
Et c'est là qu'on en arrive au point de départ du débat :
Attention : Le trailer ci-dessous contient des images et des propos susceptibles de heurter la sensibilité de certains.
Hatred est un jeu développé par le studio polonais Destructive Creations, se définissant littéralement comme un jeu de génocide. On y incarne un serial-killer dont le but est de tuer tous les civils qu'il croise. Les civils étant non armés, et principalement suppliant. Le jeu met en avant les crime de manière froide et réaliste, ou du moins gore et dérangeant.
Le créateur du jeu, Jarosław Zieliński, déclare qu'il s'agit d'une réponse au politiquement correct. Dans une interview accordée à Polygon, il explique que là où des tonnes de jeux modernes permettent de faire la même chose, le sien se différencie en se défaisant de toute hypocrisie et de fausse philosophie, pour se concentrer uniquement sur le meurtre. Il mentionne bien entendu Postal, et indique qu'il souhaite "revenir aux racines". Le jeu est destiné aux joueurs ayant eu une journée pénible de boulot, et souhaitant se défouler en tirant sur des PNJ et en détruisant le niveau.
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Je ne cache qu'à moitié mon opinion bien tranchée sur ce jeu. Je l'élaborerai plus tard, mais disons qu'il me fait franchement grimacer, de même que la philosophie des créateurs. Mais il a eu « l'avantage » de me faire poser des questions sur la façon dont la violence est représentée dans le jeu-vidéo. Après tout, comme le dit l'auteur, ce n'est pas la première fois que l'on peut commettre des actes violents et criminels dans un jeu. C'est le cas dans GTA, Watch_Dog, Assassin's Creed, et beaucoup d'autres jeux bac-à-sable. De même, Hotline Miami est un jeu à la violence acerbe, où l'on prend le rôle d'un psychopathe. Que dire de l'amoralité de Biding of Isaac ! Qu'est-ce qui fait que l'on tolère les uns, et que celui-ci choque ?
Et arrive la question de la morale. Le créateur se plaint de recevoir des propos d'indignations face à son jeu, et accuse la société… Mais en même temps, il y a de quoi être choqué par le propos du jeu. Bien qu'après tout, ce n'est qu'un jeu, et on sait que ça n'encourage pas forcément la violence. Ce qui est troublant, c'est de constater à quelle point la violence est glorifiée, aussi bien dans ce jeu que dans d'autres. L'idée de tuer est-elle devenue fun ? Pourquoi dans le jeu-vidéo, la violence est considérée comme cool ? Et surtout, existe t-il des limites à la morale affichée par les jeux ? En tant que média populaire, le jeu-vidéo a t-il un devoir de faire évoluer les mœurs dans le bon sens ? En sachant qu'il n'est pas obligé d'être toujours sérieux (encore que, comment définit-on "sérieux" ?). Des jeux comme Goat Simulator sont eux aussi des défouloirs absolument pas prise de tête, sans message ni morale, juste de gros délires pour se divertir. Mais entre un simulateur de chèvre et un simulateur de meurtre, il y a un pas.
Et l'on revient en quelque sorte sur l'image des jeux-vidéo auprès du grand public. Que ce soit par le jeu "casual", Wii et smart-phones en tête, ou les jeux à visée poétique ou sérieuse comme Journey, Child of Light, ou Papers Please, le jeu-vidéo a gagné une image de média profond et respectable, obtenant une place au sein de la culture. Or avec des jeux comme Hatred, qui réunit tout les mauvais clichés que l'on se fait du jeu, on peut se demander si on ne fait pas un pas en arrière. Et si j'ai mentionné le harcèlement en début de post, c'est aussi parce que certains « gamers » s'efforcent à maintenir une image très négative des joueurs. A t-on une responsabilité vis-à-vis de l'image du médium ? Ou bien est-on aussi en droit de ne pas y prêter d'importance et de juste s'amuser ? Comme le dit Zieliński, Hatred n'est pas un jeu là pour satisfaire la morale de tout le monde, mais un simple divertissement.
Pour finir, il n'est plus à prouver que les jeux-vidéo, en tant que média, possèdent une influence sur la société autant qu'ils en sont le reflet. Si Hatred perturbe tant, est-ce parce que l'on craint qu'il ait une mauvaise influence, ou parce qu'il est un reflet auquel on ne souhaite pas faire face ?
Pour faire court, à mon sens, comparer ce Hatred à GTA, ce serait comme comparer un film de propagande pour la "Shoah" à un film de gangster...
Hatred n'est ni plus ni moins qu'un simulateur de "meurtre de masse" tout ce qu'il y a de plus premier degré (à la différence d'un Postal), et à ce titre il est tout aussi stupide et condamnable que le serait un simulateur de camp de concentration, de "ratonnade", de viol, ou de tout ce qu'on veut de profondément criminel et abject.
GTA ou Hotline Miami sont des jeux qui très clairement jouent la carte du second degré, le monde et les personnages représentés sont des caricatures, de même les conséquences de nos actions semblent toujours minimisées par rapport à l'impact qu'elles auraient dans la réalité ; au final, en plus de permettre de toujours pouvoir prendre du recul par rapport à la "violence" dont on se fait l'acteur, cela peut même devenir un vecteur pour la critiquer ("ok, c'est rigolo dans ce contexte de jeux vidéo débridé qui se prend pas au sérieux, mais quand même, dans la réalité, une telle violence peut exister, et malheureusement certains peuvent y trouver plaisir comme je trouve plaisir à jouer à ce jeu vidéo... :/").
Dans Hatred rien à voir (du moins à ce qu'on nous montre), à l'exact opposé tout semble être fait pour que la représentation de nos actes criminels soient la plus réaliste et la moins caricatural possible, pour que les actions que l'on fait dans le jeu revête tous les aspects d'horreur qu'auraient ces mêmes actions dans la réalité....
Rien n'est ici ajouté pour rendre ces actions "fun", finalement le seul "fun" que pourrait éprouver le joueur implique qu'on puisse trouver "fun" de massacrer et voir souffrir des innocents..... O_O
La question pour moi n'est plus de savoir si quelqu'un de cérébralement normalement constitué pourrait ne plus faire de distingo entre ce qu'il fait dans ce jeu vidéo et ce qu'il pourrait faire dans la réalité (débat stérile et éculé à mon avis) ; pas plus que de savoir s'il faudrait imposer une forme de censure à la représentation de la violence (ou d'autres choses) dans un jeu vidéo (ou dans l'art en général). A mon sens, la vraie problématique, c'est qu'il y a manifestement des gens assez cérébralement dérangés pour se réjouir de l'arrivée de ce jeu (et donc à l'idée de pouvoir s'identifier à un "meurtrier de masse"), ou même tout simplement pour banaliser une telle représentation d'actes de violence extrême comme quoi après tout "ce n’est qu'un jeu vidéo", ou encore "ce n'est pas pire que GTA".... :/
Tiens justement, je viens de poster un commentaire à propos de la violence dans les jeux vidéos...
Le smiley à la fin me fait quand même doucement rigoler... Le fond de commerce d'un jeu comme GTA, et ce en dépit de ses grandes de background, c'est l'immoralité ET la violence, second degrés ou pas. Alors arriver à s'étonner que tout un chacun puisse prendre du plaisir à jouer à un jeu purement transgressif, c'est quand même assez gros.
Ensuite, dans GTA, l'absence de réalisme est toute relative, disons qu'on ne peut pas tirer sur tout le monde sans commettre une tuerie mais qu'on peut en revanche commettre une tuerie sans se faire arrêter... Bon ça fait quand même une petite différence.
Et pour en finir avec GTA certains pourront arguer que commettre une tuerie n'est pas un but en soi dans ce jeu, mais c'est très discutable parce que GTA ça reste fondamentalement un bac à sable avec un flingue.
Pour ce qui est des "limites", bien sûr qu'il existe des limites pour ceux qui se poseraient la question... Si l'on devait procéder à une démonstration par l'absurde, je vous suggèrerais simplement d'imaginer des graphismes et une IA (avec tout ce que ça implique) hyper réalistes avec l'Oculus Rift dans un Call of en Afrique ou même un GTA... Ça ne vous mettrait pas quand même un tout petit peu mal à l'aise ?
En réalité, les limites, elles ont été dépassées depuis longtemps déjà, y compris au cinéma ; mais il y a une différence de taille entre le cinéma et le jeu vidéo (et ça apparemment il y a pas mal de gens qui ont du mal à l'entendre) : l'interractivité.
Je suis pas tout à fait d'accord avec toi Elrhim et j'aurais tendance à rejoindre Nival concernant GTA. La violence y certes un point essentiel, je pense que personne ne peut le nier, mais elle caricaturée et n'est pas l'objectif central du jeu contrairement à Hatred qui s'affiche comme un véritable simulateur de meurtres pour reprendre l'expression d'Itooh. Tu as déjà anticipé cet argument mais il fallait bien que quelqu'un l'écrive, les meurtres de masse dans GTA sont possibles, pas nécessaires. De plus le background de GTA et son scénar très travaillés en font une véritable critique de la société américaine et de son extrême violence, ce que ne semble pas être Hatred. Ceci dit qu'on s'entende bien, je ne suis pas en train de défendre GTA coûte que coûte et je suis bien conscient du fait que tout le monde ne perçoit pas dans GTA la critique sous-jacente, je dis simplement que GTA et Hatred ne sont pas à mettre sur le même plan. Quant au Call Of ou GTA avec l'Oculus Rift que tu imagines, je te rejoins entièrement sur le fait qu'effectivement ce serait problématique, encore une fois il ne s'agit pas de défendre tous les jeux violents et de pointer Hatred du doigt.
Personnellement ce qui me dérange beaucoup dans Hatred ce sont les réactions des passants qui se font agresser. Ces réactions en plus d'être extrêmement réalistes donnent au joueur un sentiment de contrôle total sur le monde qui l'entoure, il est tout puissant et craint par la population. A mon avis là où un joueur qui fait une tuerie de masse dans GTA trouve le fun dans les explosions en série de dizaines de véhicules ou dans une mise en situation improbable qui lui permettra de faire un joli feu d'artifice, le joueur de Hatred prend plaisir à voir la peur qu'il fait naître sur les passants. Encore une fois, je sais bien que dans GTA aussi les passants se protègent et s'enfuient lorsqu'on les vise et que le joueur y possède également les pleins pouvoirs, mais il me semble que le sentiment de domination sur autrui y est moins important.
Je suis tout à fait d'accord avec toi Nival sur le fait qu'un débat autour de la réception de ce genre de jeux par une personne normalement constituée est complètement stérile, mais j'irai pas jusqu'à dire que les gens qui se réjouissent de ce genre de jeux sont cérébralement dérangés, il s'agit à mon avis pour la plupart d'amateurs de la provoc à tout prix ou de partisans inconditionnels de la fameuse liberté d'expression.
Pour finir je trouve que la question que soulève Itooh sur les critères qui rendent acceptable la violence dans certains jeux et pas dans d'autres est très intéressante. J'ai pas grand chose à en dire encore, mais ça m'a interrogé sur la représentation de la violence à l'image. Je suis récemment allé voir McBeth au théâtre, et une des scènes de meurtre était suggérée par un jeu de lumière, de son, et de grands draps blancs entachés de sang qui faisaient office de rideau entre la scène et le public. Certes on ne voyait rien, mais c'était tout de même un moment effroyable. Seulement du côté du jeu vidéo, du moins dans ceux que je connais, on a tendance à représenter très concrètement la violence. Vous connaissez des jeux qui ont tenté de traiter de cette question, qui ont tenté de représenter la violence de manière détournée et pourtant très intense?
PS : Comment vous faites les petits encarts "Citation" ? J'ai pas trouvé dans les astuces de rédac
Vous (deux) trouvez le débat sur l'impact des jeux violents sur les personnes "saines" stérile... Ce qu'il faut bien se dire, c'est qu'il n'y a pas que des fous qui commettent des meurtres, et la probabilité d'un passage à l'acte dépend notamment de la perception par l'individu de l'acte violent. Qui pourrait affirmer avec certitude que l'interractivité n'a pas d'effet significatif sur cette perception ? Ce serait évidemment un facteur parmi beaucoup d'autres, pour autant ce n'est pas une question à prendre à la légère, et je ne peux m'empêcher de penser que les gens qui la jugent stérile (qui sont nombreux) manquent singulièrement de recul...
Sinon pour faire une citation il faut cliquer sur la case avec les guillemets.
Rule of Rose. Il s'agit d'un Survival Horror, très classique dans la forme, à tendance horreur psychologique sorti en 2006 sur PS2 et qui a fait scandale pour de très mauvaises raisons. Je vous laisse lire la page Wikipédia du jeu pour plus d'infos, l'affaire est consternante. Je vous rassure, à aucun moment moment on ne maltraite des enfants et le discours des élus qui ont pris ce titre en grippe n'ont apparemment jamais ne serait-ce que jeté un oeil sur une image du jeu. Bref. Il y a bel et bien des combats dans Rule of Rose mais contre des "lutins", à comprendre des créatures imaginaires qui ont, à part pour les boss, un corps d'enfant et une tête d'animal. Mais rien de plus méchant, ni effrayant, ni violent de ce que pourrait faire un Tim Burton, d'ailleurs, on est complètement dans un délire "conte macabre". Les enfant sont bien au coeur de l'histoire et se comportent la plupart du temps de manière cruelle entre eux et avec Jennifer (le personnage que contrôle le joueur) et bien que certaines de leurs actions soient difficiles parce que ce sont des enfants, cela reste en général de ce niveau là :
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En réalité, Rule of Rose contient bien des thématiques dérangeantes, notamment les abus sexuels, mais toujours suggéré des manière plus où moins implicite.
Ce n'est pas un jeu que je recommanderai à tout le monde, mais je pense qu'il répond à ta question.
Mon opinion sur la violence (et le sexe aussi d'ailleurs) dans les jeux vidéos est assez tranchée. Quand j'étais ado, je pouvais jouer à des jeux super violents : doom, mortal kombat, etc, et c'était super fun! ça a participé à forger mon identité et ma culture, mais ça ne m'a pas rendu cinglé. En revanche, aujourd'hui les jeux peuvent être infiniment plus réalistes où aller dans des directions souvent beaucoup plus malsaines qu'à l'époque. Il est évident qu'il faut protéger les enfants et les ados qui sont en train de se construire et qui peuvent parfois difficilement faire la différence entre le virtuel et le réel. Il y a des outils pour ça : ça s'appelle le contrôle parental et la classification Pegi, et je pense que si cette règle simple - respecter les tranches d'âge - était appliquée on éviterait de penser sans cesse que la violence dans les jeux vidéos est un danger pour la société. Si un adulte commet un acte très répréhensible et mettant en cause les jeux vidéos, je suis persuadé que s'il ne touchait jamais à une manette, il aurait finit par trouver autre chose qui lui fasse péter les plombs.
Si la petite partie des jeux jeux Pegi 16/18 était réellement imperméable, les adultes à peu près sain d'esprit auraient peut être moins à subir une censure parfois complètement ubuesque. On parle de sexe dans le jeu? Hyperdevotion Noire, un spin of des Hyperdimension Neptunia va bientôt sortir chez nous. je vous laisse comparer la jaquette européenne et la jaquette japonaise. C'est tellement con que ça me fait rire d'autant plus que, à ce que j'en sais, le jeu en lui même n'a pas subit de censure et qu'il est Pegi 16 (oui ils ont caché un bout de décolleté pour un jeu jeunes adultes). On va peut être m'expliquer qu'un trop grand décolleté pourrait choquer les enfants qui se promènent dans leur boutique préférée, mais ai-je besoin de vous demander de regarder les photos de presse des popstars du moments (Rihanna, Lady Gaga & co)?
Tout ça pour dire que oui, il peut y avoir des choses dérangeantes dans les jeux vidéos, oui Hatred a l'air sale et amoral, mais c'est comme les personnes qui prennent plaisir à mater du torture porn. Dans la vraie vie, personne n'a repris le flambeau de Jigsaw.
"Voler est d'une simplicité biblique, si tu ne sais pas comment t'y prendre. C'est le truc important : ne pas être du tout sûr de savoir comment on s'y prend"
Je ne pense pas que la question concerne uniquement les enfants. Les médias influencent aussi bien les adultes, ce n'est pas une question de savoir faire la distinction entre le fictif et le réel. Livre, films, et jeux-vidéo, véhiculent des idées. Particulièrement dans la culture pop.
Et si ça ne rend pas violent, ça impacte la façon dont on perçoit la violence. Pas nécessairement les grands crimes, mais aussi celle au quotidien. Beaucoup de personnes considèrent par exemple comme normal de se défendre d'une agression verbale en utilisant les poings. Et ne parlons pas des violences conjugales, les émeutes, voire des questions de société comme le droit au port d'arme, faire sa propre justice, la torture, ou la peine capitale. On ne va pas donner le jeu-vidéo comme responsable, bien évidemment, mais de même que l'ensemble de la culture, il a son influence.
Parce que dans la culture pop, la violence c'est positif. C'est cool, c'est amusant, c'est classe… Au cinéma, résoudre un problème par la violence n'est pas pathétique, mais badass.
Je ne condamne pas complètement la violence dans la fiction, bien évidemment ! Je suis le premier amateur d'actions, de polars, voire de violence comique (merci Warner Bros Cartoons et Tex Avery). Mais en sur-médiatisant la violence comme positive, on en fait oublier les aspects négatifs.
Pas vraiment une question d'enfant ou de tendance à confondre virtuel et réel. D'ailleurs je suis du même avis que Elrhim sur la criminalité meurtrière : elle n'est pas nécessairement l'œuvre de détraqués. On doit davantage s'inquiéter de ce que la culture créer comme idée, et aussi ce qu'elle dit sur nous. Pour reprendre une hypothèse de Doug Walker à laquelle j'adhère complètement : la fiction n'est pas un échappatoire, mais une façon de mieux comprendre la réalité.
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La violence de Hatred est cela dit particulière parce que comme ça a été fait remarqué, elle est bien plus glauque que celle dont on a l'habitude dans les jeux. En fait, elle montre des aspects négatifs de la violence dont on a pas l'habitude : la peur, la peine, l'humiliation, la douleur, l'assouvissement… Dans les fictions grand public, c'est des aspects qui soit passent à côté (le ranger tue des dizaines de soldats qui ne sont que figurants, et on ne le voit que survivre glorieusement), soit sont dramatisés (le mort ne reverra jamais ses enfants… et c'est pas drôle). On a là une violence plus crue, sombre, et dénuée de toute morale synthétique (« c'est des méchants ils ont pas d'âme », voire parfois « tu sers une plus grande cause »).
Ce qui m'embêtes un peu, c'est que plutôt que de proposer un regard intelligent sur ces aspects négatifs, le jeu (et le réalisateur) n'a l'air que de vouloir les glorifier. Comme l'a dit K_rlito, l'amusement vient principalement du sentiment de puissance. Hatred booste l'égo du joueur en lui offrant une histoire où il est tout puissant. Et je conçois qu'il y ait un public pour ça ! Il y a quelques années, en regardant les discussions sur Just Cause 2 (pas encore sorti), je trouvais des joueurs qui espérait que la grande liberté du jeu offrirait des moyens de torture complètement sadique (retirer les organes, forcer le PNJ à contempler sa douleur, etc…). L'amusement ne vient pas de l'action ou du côté comique, mais vraiment du sentiment de domination, et voir la souffrance chez l'autre.
Je m'efforce d'être ouvert et de considérer que si ça amuse les gens, ça n'est pas dramatique. Je ne voudrais pas tomber dans le « Vous ne devriez pas apprécier ce que moi j'apprécie pas. ». Malgré tout, je trouve ça bizarre et pas rassurant pour la société voire l'espèce qu'on puisse trouver du plaisir à uniquement faire souffrir.
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Pour revenir un peu sur l'actualité « récente » de Hatred, je suis clairement contre son interdiction sur Steam. Bon, la plate-forme fait ce qu'elle veut, mais ça a eu plus l'air de censure politiquement correcte que véritable choix. Avec la pub que ça lui a fait, le mal est presque fait. Amusant ou non, ça m'a quand même l'air d'être le niveau zéro de provocation, l'œuvre choquante juste pour attirer l'attention (« Regardez-moi, je suis marginal ! ») sans avoir de message derrière pour le justifier. Ça serait bête que ce jeu devienne un étendard de la liberté artistique et d'expression si son propos est vide.
Aussi je croise les doigts pour qu'il ne plaise qu'à une minorité. Un peu bas de ma part, mais comme je disais dans mon premier message, si ce jeu s'avère un hit, ça en dit un peu long sur nous-même et le jeu-vidéo. Où on a réussi à faire de ce média un mode d'expression artistique, mais où ce qui divertirait malgré tout le plus de monde, c'est la violence gratuite. Le mieux à faire est de l'ignorer… Pas sûr que je me débrouille bien. x)
Sinon, un autre regard très intéressant est celui très personnel publié par Kotaku. Où Hatred et les jeux ultra-violents sert en quelque sorte de cure rappelant à quel point la violence est malsaine. Et on est loin de la simple idée de « défouloir », puisque l'auteur explique bien qu'y jouer est pénible pour lui, mais nécessaire. Je trouve cette vision enrichissante, aussi bien pour le regard sur la culture que pour celui sur l'humain.
Mes jeux sur itch.io
Mes vidéos sur Youtube
Mes reins sur ebay (pas encore disponible)
Ouais, le jeu vidéo cathartique... J'avais déjà discuté de ça avec quelqu'un qui jugeait qu'un acte accompli dans un jeu vidéo n'était en réalité qu'un acte tronqué, incomplet et frustrant.
Je sais pas si je serai aussi catégorique mais je pense quand même que l'interactivité rend difficile la prise de distance par rapport à ce à quoi l'on assiste. Ce n'est pas comme un film, ce n'est pas un simple spectacle.
EDIT/ Moi ce que je ressens intuitivement -c'est très personnel- c'est que les "bons" jeux de ce point de vue sont ceux qui substituent ce qui caractérise la violence, qui remplacent le sang par un effet de choc par exemple, une sorte de mini-explosion comme on peut le voir dans les JRPG et les ARPG, qui remplacent le tranchant d'une lame par un coup...
De cette façon on déplace la finalité de l'acte qui devient substantiel et complet dans le sens o`u il n'est pas réaliste.
C'est bien ce qui me choque au final. Je suis pour que la liberté de créer soit la plus large possible, et contre la censure, d'Hatred y compris, mais ce qui me perturbe c'est pas que le jeu existe et puisse exister, c'est en revanche de voir autant de gens trouver ce nanar "génial", ou de ne pas voir la différence avec d'autres jeux-vidéos "violents" qui pourtant la traite de façon bien différente.
En gros pour moi s'est aussi consternant que si des gosses s’esclaffaient devant les pubs glauques de la sécurité routière en trouvant ça "trop fun :)", "bien trash :D", "trop cool" en somme, justifiant après que "ben quoi, c'est pas pire que se distraire devant un film d’horreur". Ben non c'est pas pareil pour moi, d'un coté on introduit une dose de décalage voire de légèreté qui pousse à considérer la violence avec un certain second degré, ou du moins une certaine distance, de l'autre tout est fait pour une prise de conscience de ce qui est montré la plus premier degré possible, avec le plus de proximité possible ; et dans le cas des spots de la sécurité routière cela est fait dans un but éducatif louable! Dans le cas d'Hatred... -_-?
Et sinon dire que les crimes ne sont pas forcément l’œuvre de "détraqués", tout est relatif... Ok un "crime passionnel", ça se discute ...quoi que, des traumatismes amoureux ça arrive tout les jours à plein de type et que tous ne transforme pas ça en assassinat... Un holdup qui dégénère en bain de sang, ok, le type au départ voulait juste "de l'argent facile" sans faire de mal à personne et la situation lui a échappé ...quoique là encore, faut en croiser des types qui ont commis même juste le délit sans le meurtre, pour réaliser qu'on y trouve plus de personnes aux personnalités déviantes (genre franchement antisociale) que ce qu'on croise au quotidien... (c’est toujours pareil, ceux pétris d'humanisme qui ne font que discourir sur le sujet, et ceux qui sont confrontés de près à la réalité des faits, les avis peuvent quelque peu diverger... même s'il ne s'agit pas de tomber dans la caricature bien sûr!! <-- on va me taxer de ça dans pas longtemps je sens ^^). Mais après ceux qui réalisent des carnages à l'arme automatique dans leur lycée parce que'ils sont "mal dans leur peau", hum, désolé, mais si ça c'est pas le symptôme de quelques déséquilibres comportementaux... :/
Après je ne dit pas que lorsqu'une personne "détraquée" commet un méfait sinistre il s'agit "d'un fou" (qui sous-entendrait un problème de fonctionnement mental intrinsèque à la personne elle-même), elle peut avoir été "détraquée" par son vécu, la société et la culture dans laquelle elle baigne. Mais quand même, quand on en vient à tuer quelqu'un sans raison "compréhensible" (je ne dis même pas "sans bonne raison"... :P), il y a quand même un problème quelque part... :/
Les gens qui tuent sans raison manifeste sont une minorité, moi je parle de tous les autres, les maris qui battent leur femme, les bagarres qui dégénèrent etc, tous ces gens qui dans une situation donnée se sentent autorisés à faire usage de la violence, et c'est là que les jeux comme beaucoup d'autres choses peuvent jouer un rôle.
Si tu préfères on peut considérer que tous les meurtriers potentiels sont détraqués et donc qu'une part importante de la population est détraquée, mais ça ne change pas grand chose au fond du problème.
EDIT/ Par contre si ce jeu vous semble aussi dégueulasse et répréhensible (et c'est pas moi qui vais vous contredire là-dessus), je ne vois pas en quoi ça vous dérange tant qu'il puisse être censuré (ce qui n'est même pas le cas d'ailleurs), l'effet Charlie Hebdo...?
Bon, et qu'est-ce-que tu dirais d'un jeu de "simulation de tabassage de femme" du coup? :/
Finalement, que de la "violence ordinaire", "banale" on aurait envie de penser en lisant tes mots...
Mais au final surtout pas "pire" qu'un "simulateur de meurtre de masse sans raison" où là on verse carrément dans un acte de déséquilibré, alors que "battre sa femme" on a ptêt bien une raison de le faire, ou en tout cas on ne ferait jamais rien qui ne puisse être un acte du quotidien d'une personne au comportement sain... :/
Bah désolé, pour moi je ne vois pas vraiment la différence entre un "simulateur de massacre d'innocents", un "simulateur de tabassage de femme", un "simulateur de viol", un "simulateur de <<ratonnade>>", un "simulateur de torture"...
Et ce qui me gêne, comme déjà dit, c'est pas autant que de tels jeux existeraient, mais que tout un tas de gens se réjouiraient à l'idée de pouvoir y jouer... :/
Non, décidément je trouve qu'il y a un moment où il y a un problème, et qui ne vient pas du développeur un peut bêta qui se met à développer ce genre de chose (phénomène en soit marginal et insignifiant), mais de l'engouement que cela semble susciter, et surtout la défense d'un tel projet que certains vont porter (et pas une minorité manifestement!) ; mais au nom de quoi in fine? Du plaisir de s'identifier à un déséquilibré distribuant sans discernement la souffrance et la mort chez son voisin ou son collègue de bureau??
Non, franchement, quelque chose m'échappe.
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