S’étant auparavant aventurés sur le terrain du jeu de rythme avec “… and then it rained” ou du puzzle game via “Twisted Lines”, tous deux sortis sur l’Apple Store, le studio Berlinois Megagon Industries continue d’explorer de nouveaux horizons. Fruit de quatre années de développement ponctuées par une campagne Kickstater couronnée de succès, Lonely Mountains : Downhill représente à ce jour leur titre le plus ambitieux ainsi qu’un virage à 180° vers le genre périlleux du jeu de VTT. Alors qu’attendre à l’arrivée : un dérapage contrôlé ou une gamelle retentissante ?
Il faut dire que le nouveau projet du duo composé de Jan Bubenik et Daniel Helbig débarque dans une année spéciale pour tous les fans de vélo tout terrain vidéoludique. Sorti en Mai dernier, Descenders semblait avoir posé les bases d’un genre quelque peu délaissé, proposant un subtil équilibre arcade/simu carburant à la vitesse pure et aux tricks spectaculaires. Lonely Mountains s’éloigne radicalement de cette démarche. Épurant son gameplay jusqu’au plus simple appareil le jeu propose de contrôler un freerider devant joindre un point A à un point B le plus rapidement possible. Jusqu’ici, rien de neuf sous le soleil. Sauf qu'au lieu d’une simple piste délimitée tout l’intérêt réside dans votre curiosité à explorer le circuit sur lequel vous vous embarquez. Un petit chemin de terre plus sécure sera proposé aux joueurs les plus prudents, mais tout le sel du jeu réside dans cette liberté de faire sien un level design absolument ingénieux. Armé d’une jauge de sprint, de boutons “accélérer” et “freiner” , et d’un joystick pour la direction, seuls conteront votre appréhension de la pente et de la vitesse pour déboucher sur une embardée réussie ou un crash fatal. De la pure arcade mêlée à une mécanique imparable de die and retry. D’autant qu’une caméra plutôt insolite vous accompagnera. Non plus située derrière vous mais en grande majorité face à votre avatar, elle renforcera cet aspect imprévisible de la descente, ne donnant que peu de chances de survie aux adeptes de la très grande vitesse. Mais n’ayez crainte. Tentative après tentative, vos réflexes s’aiguiseront, votre peur s’estompera, et votre chrono final en ressortira bonifié. Mieux encore, la liberté octroyée au joueur permet de découvrir des recoins, des raccourcis, de jouer avec la physique de notre petit avatar et d’améliorer ainsi son temps de manière peu académique, avec la délicieuse fierté d’avoir joué un mauvais tour au game designer. Chaque joueur abordera différemment des niveaux similaires, et il se dégage de ce gameplay évolutif un sentiment absolument jubilatoire.
Plus ode à la découverte et l’exploration que pur jeu de courses, Lonely Mountains cultive cette malice jusque dans sa direction artistique. Oubliez l'emphase des jeux de courses habituels, boostés au rock ou à l’électro survitaminée. Ici on joue la carte d’un minimalisme total. La nature, et son interaction avec votre vélo. Voici les seuls sons que vous entendrez. Si cela pourra angoisser les plus acrophobes d’entre nous, force est de constater que l’accent est mis sur des bruitages précis et immersifs, renforçant constamment le feedback de chaque mouvement. Arpenter ces circuits faits mains devient grisant, et cela est renforcé par le style graphique choisi. Avec sa palette de couleur chatoyante et ses personnages cubiques, tout de Low Poly vêtus, Lonely Mountains vous ramènera en enfance. Des personnages que vous pourrez customiser au gré des améliorations cosmétiques débloquées tout au long de vos parties, même si tout cela avouons-le, reste bien secondaire et minimaliste. On prend toutefois beaucoup de plaisir à parcourir la flore de ces quatre montagnes qui incluent elles même quatre circuits chacune. Le jeu alterne alors univers verdoyants, automnaux ou désertiques avec brio, adaptant en conséquence son level design. La verticalité se fait plus grande dans la montagne “Alpine”, l’eau se mêle à la fête sur les sentiers forestiers, le vide et les routes sinueuses dans le désert... On ne lance pas le jeu pour prendre une claque esthétique, mais ces univers simples et diaboliquement bien agencés sont un régal et donnent envie de s’attarder sur chaque circuit.
Et cela est bien l’essentiel. C’est bel et bien notre adhésion totale à cette proposition de game design qui nous harponne depuis plusieurs jours, traquant inlassablement le moindre raccourci passé sous notre radar. Ne comptez malheureusement pas sur le jeu pour votre tenir par la main dans des modes divers et variés. Du contre la montre avec classement mondial, des défis à relever (chrono à battre ou nombre de chutes limitées) et c’est tout. Pas de multi, de mini jeu, de mode story. Un jeu simple, sans fioritures, dont la démarche “Easy to play, hard to master” pourra se traduire en une sympathique balade champêtre de quelques heures pour certains, ou en une compétition de speedrun sans relâche pour d’autres. À noter que vous pourrez débloquer de nouvelles montures au gré de vos exploits, et que celles-là, contrairement aux tenues, n’ont rien de cosmétiques. Il est donc jubilatoire de revenir sur des circuits de début de jeu armé d’une nouvelle machine de guerre permettant plus d’agilité, ou de vitesse, en fonction du parcours ou de votre profil de casse-cou. Dommage qu’il faille jouer assez longuement pour y avoir accès, ce qui cantonnera les joueurs occasionnels, adeptes de balades à la fraîche, aux premiers modèles somme toute classiques. Au rayon des petites déceptions, citons également l’absence d’un système de captures et replays permettant de sauvegarder nos gadins les plus mémorables. Vous vous en doutez, mémoriser les meilleures trajectoires et raccourcis prendra du temps, et cet apprentissage sera ponctué de gamelles absolument savoureuses que l’on aurait aimé pouvoir se partager entre copains.
Notre avis : Vous l’aurez compris, nous avons été plus que conquis par la balade (parfois sauvage) proposée par Megagon Industries. Lonely Mountains : Downhill ne brille pas par son écrin ou son contenu mais bel et bien par un incroyable gameplay mêlant exploration roublarde et technicité diabolique. Il parvient, dans une épure et une simplicité qui coulent de source, à nous intimer de sortir des sentiers battus, de prendre des risques, et de savourer une promenade qui se terminera peut-être plus tôt que prévue. Que ce soit pour une heure ou pour une année, ne passez surtout pas votre chemin.
Supports :
Disponible sur Steam pour 19,99 Euros / Xbox Gamepass Xbox et PC / Xbox pour 19,99 Euros / PS4 pour 19,99 euros / Sortie prévue sur Switch Fin 2019
Merci pour cette critique détaillée. Le jeu a l'air top d'un point de vu jouabilité avec une physique très soignée, et graphiquement (ainsi qu'au niveau audio) je le trouve très aguicheur, mais il faut reconnaitre que le contenu pour le moins chiche (doublé d'un aspect grinding assez déplacé à mon sens) à de quoi refroidir ...
Merci pour ton commentaire ! Je comprends tes réserves sur le contenu du jeu, mais surtout sur la manière dont celui ci est débloqué. Compte tenu de l'approche du titre, j'aurai vraiment préféré une liberté d'entrée de jeu, proposant une diversité de vélos (et donc d'approches) dès les premières minutes. C'est le point le plus gênant pour ma part. Mais comme tu as pu le comprendre, l'inventivité du Level Design, de l'ambiance et du gameplay m'a fait oublié le reste.J'attends la version Switch de pied ferme. Tu penses l'essayer du coup ?
Je le garde à l’œil, mais assurément d'autres jeux qui me tentent plus à faire avant. C'est dur à dire, mais s'il passe en solde à prix dérisoire je m'y essaierai sans doute plus facilement "entre deux".
On a une petite idée ou un indice sur la date de sortie sur Switch ?
J'ai vraiment hâte de mettre la main dessus.