Bon, il n'y aura pas de nouvelle partie du Making Of ce dimanche. J'avais presque fini de traduire la partie sur les caméras lorsque j'ai eu un gros bug qui a tout effacé ! Un peu dégouté quand même
Ouais, merci MaximeG C'est de ma faute aussi, je n'aurais pas dû faire la traduction directement sur le forum, mais plutôt dans un document texte. Je tape tout directement ici sur Indiemag, rien que pour vous, mais du coup quand j'ai un bug je dois tout retaper...
En attendant ça laisse le temps de lire les parties précédentes pour ceux qui seraient intéressés!
Salut, juste pour dire que c'est vraiment SUPER INTÉRESSANT, et te féliciter pour cet énorme travail de traduction que tu réalises ici!! Un gros merci évidemment aussi à Simon, qui a en amont rédigé ce gros pavé éminemment instructif, très agréable à lire, et richement (et utilement) illustré!!
Nous ne l'avons pas encore dit mais nous suivons ce post avec assiduité ! C'est un magnifique making of comme on en voit peu. Les images et photos sont superbes et le processus est passionnant.
Merci de prendre le temps de rédiger et traduire tout cela, c'est un réel plaisir à lire et c'est toujours chouette d'entrer dans les coulisses d'un si bel univers.
C'est terrible cette histoire de bug qui a détruit tout ton travail... Courage !
Euh mais il me semble que c'est Simon qui écrit sur IndieMag vu que c'est un peu le fondateur de The Icehouse, c'est pour ça que ça m'étonne qu'il écrive "on" plutôt que "moi et les membres de mon collectif" quand il donne son avis sur un jeu référencé sur IndieMag, à moins que ça soit Yves qui poste les news du collectif, je sais pas
Merci à tous, c'est très encourageant ! (vraiment, vraiment)
La suite arrivera très vite dans les jours qui viennent.
Euh mais il me semble que c'est Simon qui écrit sur IndieMag vu que c'est un peu le fondateur de The Icehouse
haha tu n'as pas tout à fait tort, mais c'est un compte dédié au collectif, alors ici on parle pour tout le monde, selon nos projets et notre actualité. On ne sait pas non plus si à l'avenir il n'y aura pas de nouveaux membres francophones chez Icehouse, ni de quelle façon nous choisirons de communiquer tous ensemble. On essaye surtout de différencier le collectif et les développeurs dans nos interventions. Là c'est le travail de Simon Says: Play! présenté par The Icehouse, mais à l'avenir ça pourrait être le travail de Ape Marina ou Luminy Studios par exemple. Cela dépend aussi de ce que nos développeurs prennent le temps de partager.
Chez Atelier Sentô on ne sait jamais si c'est Olivier ou Cécile qui répond C'est peut-être un yokai qu'ils ont ramené de leurs voyages !
La dernière fois, nous avons vu comment les environnements 3D sont créés, en prenant en compte l'emplacement des énigmes. Si tout est prêt pour se promener sur Tytaah, il reste encore à préparer les caméras qui permettront vraiment de s'immerger dans les lieux.
Temps réel VS pré-calculé
Contrairement à ce que l'on a l'habitude de voir dans un jeu à la 1ère personne en 3D temps réel, où nous regardons ce que nous voulons à travers les yeux du héros, dans Catyph j'ai dû créer un système de caméras "sur rails" afin de reproduire une certaine continuité animée lors des déplacements dans des décors figés. Je pense que beaucoup de joueurs non habitués à ce type de jeu critiqueront mon choix de ne pas avoir eu recours à la 3D en temps réel, mais je l'assume pleinement.
C'est bien simple : puisque à ce jour je n'ai pas l'habitude de développer sous Unity ou UDK, et que je suis de toutes façons tout seul pour créer tous les graphismes du jeu, je suis persuadé que si je n'avais pas fait le choix du pré-calculé, je n'aurais sans doute jamais terminé le développement de ASA ou Catyph. Nous verrons aussi un peu plus loin que cet aspect de "tableau figé" créé dans ce style de jeu me plait particulièrement en tant que "réalisateur" qui tient la caméra.
Par ailleurs, puisque l'on parle de point & click, l'idée de se promener en temps réel est pour moi difficile à concevoir. Dans un point & click, on pointe et on clique : cela veut bien dire que le jeu est pensé pour être joué à la souris. Les exemples de Myst-like en temps réel que j'ai pu essayer (The Five Cores, Roonsehv...) ont tous de nombreuses qualités, mais je n'ai jamais pu me faire à leur gameplay. J'ai pourtant déjà passé de nombreuses heures dans des FPS ou des jeux tels que Skyrim ou Morrowind, mais dans un jeu d'aventure/énigmes, le déplacement au clavier tel qu'on le connait ne colle pas. Le gameplay est généralement nerveux : le héros avance brusquement dès que l'on tente d'avancer, la vitesse de déplacement ne me convient jamais (trop lent quand on marche, trop frénétique quand on court), et au final je ne me sens pas à l'aise pour résoudre les énigmes et découvrir le monde. Au contraire dans un jeu en pré-calculé (c'est à dire en 2D, dans le fond), on a tout le temps d'anticiper ses mouvements et de réfléchir à ses prochaines actions.
Gameplay archaïque ? Chacun se fera son avis : je sais d'avance que si je devais utiliser un moteur 3D temps réel, j'aurais un énorme travail à effectuer sur le gameplay avant d'être réellement convaincu. Cela ne veut pas dire que je souhaite travailler en pré-calculé jusqu'à la fin de mes jours. Un jeu tel qu'ASA ou Catyph en temps réel me plairait sans doute particulièrement, mais je dois d'abord apprendre à utiliser correctement les moteurs qui existent, et proposer un gameplay qui puisse satisfaire les différents types de joueurs. L'une de mes idées serait de conserver les déplacements traditionnels au clavier pour les joueurs qui y tiennent particulièrement, mais d'ajouter des pointeurs dans les décors qui permettent de se "téléporter" à la vue suivante, comme on le ferait dans un Myst traditionnel, rendant le jeu entièrement jouable à la souris pour ceux qui le souhaient. C'est un mécanisme de gameplay que j'aimerais beaucoup expérimenter dans un prochain jeu (et pourquoi pas avec l'Oculus en prime ?). Je n'en suis pas là, et tout dépendra du succès de mes prochains jeux !
Pour le moment, le gameplay de Catyph doit prendre en compte les contraintes suivantes :
Je fais le jeu tout seul et sans budget - prendre en compte les restrictions techniques de mes logiciels habituels.
Je préfère le gameplay traditionnel "point & click" et je dois le rendre suffisamment clair malgré les nombreuses vues à traiter dans les décors.
Je souhaite proposer une expérience immersive, cinématographique en quelque sorte, et cela dans la continuité de mon expérience passée dans le film d'animation.
Ce dernier point a retenu toute mon attention. Même s'il est vrai qu'on ne peut pas définir Catyph (ni même ASA, Myst ou Rhem...) comme étant des films interactifs, ce concept d'immersion cinématographique n'est pas non plus totalement injustifié :
ces jeux sont souvent dans la continuité d'un long film d'introduction (celui de Riven est immersif, ASA est la suite de mon court-métrage de 2011, etc).
ces jeux racontent une histoire au spectateur (à travers différents personnages réels ou en 3D, et un jeu d'acteurs, des voix).
le “réalisateur” choisit lui-même ses angles de vue et place ses caméras selon son ressenti, en tenant compte de ce qu'il souhaite lui-même montrer.
Cela fait des Myst-like des jeux très personnels, où les auteurs/développeurs travaillent les détails des environnements pour reproduire le monde qu'ils ont imaginé. En empêchant le joueur de tourner la tête et d'aller là où il veut, et en lui montrant une image précise, celui-ci est immédiatement impliqué dans la vision de l'auteur. Et voilà que l'on rejoint la définition même d'un Myst-like : ce sont des jeux où le joueur est piégé dans un lieu inconnu, créé par un autre. C'est comme si notre esprit était projeté dans le corps d'un individu lambda, à des années-lumières de la Terre, et que l'on pouvait prendre les décisions à travers lui, sans être vraiment totalement maître de ce qu'il se passe autour de nous.
L'imagination et les rêves
Ce qui me semble le plus efficace pour expliquer l'intérêt principal des Myst-like (à savoir l'immersion et l'exploration d'un monde "2D"), c'est de les comparer à l'expérience que l'on peut avoir avec des livres.
Dans un livre, il n'y a habituellement pas d'images, ce n'est que du texte. Beaucoup de personnes boudent les livres pour cette raison : depuis l'arrivée de la télévision et, mieux encore, des ordinateurs, nous vivons dans une société d'images, où nous avons pris l'habitude d'associer tout ce qui nous entoure de visuels en tous genres. Pourtant, lorsqu'un film sort au cinéma et qu'il s'agit d'un film inspiré d'un livre célèbre, on peut remarquer quelque chose : même si le film en lui-même est excellent, la plupart des personnes qui ont adoré le livre original feront part d'une certaine déception. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'ils ne voyaient pas le héros ainsi, ou parce que les lieux ne correspondent pas vraiment à ce qu'ils pensaient.
On peut trouver de nombreuses raisons pour expliquer que certaines personnes préfèrent un livre à son adaptation en film, mais la plupart du temps, cela se résume à une seule chose : le pouvoir de l'imagination.
Dans Catyph et ASA (et les autres jeux du genre) l'imagination a bien plus de place que dans un jeu où l'on nous montre tout. Ce que je veux dire ici, c'est que même si les graphismes pré-calculés peuvent d'abord sembler restrictifs (je reconnais moi-même avoir été frustré quand j'ai joué à Riven pour la première fois), hé bien si l'on prend du recul et que l'on réalise que ce type de jeu n'a pas vocation à faire comme les autres, alors on comprend l'importance et l'impact de chaque image. Tout ce qui n'est pas visible en tournant la tête (qui est hors du champ de vision de la caméra), peut alors être inventé par le joueur, et bien souvent c'est un processus inconscient. Imaginez simplement le monde par vous-même !
A mes yeux c'est important, tout comme ça l'est dans d'autres créations artistiques. Ce qui fait qu'une peinture ou une photo nous touche particulièrement, c'est ce qu'elle véhicule comme émotions, et cela grâce à notre imagination : en nous faisant revivre une scène passée, ou en inventant un monde abstrait qui nous parle. Tout le monde se fiche que les tableaux de Monet soient des images fixes : leur intérêt est ailleurs, et ça n'en fait pas moins des œuvres intéressantes à regarder. Je crois que cela est vrai dans le cas de jeux comme Myst, ASA et Catyph. Cette apparente restriction de gameplay devrait devenir une porte ouverte, au rêve par exemple. C'est ainsi que j'ai compris l'intérêt de Riven en y jouant autrefois. Comme je l'ai dit j'étais parfois déçu de me déplacer dans des images fixes, mais l'instant d'après, j'avais en fait reconstruit les éléments manquants du décor dans ma tête. Les oiseaux que j'entendais dans la bande-son et qui n'étaient pas visibles à l'écran, c'était pour moi les oiseaux inconnus d'un monde étrange, qui tournoyaient haut dans le ciel au-dessus de la mer, et qui restaient inaccessibles malgré mes efforts. Si l'on m'avait montré des mouettes en 3D, je n'aurais pas eu le même ressenti : j'aurais juste vu des mouettes comme tant d'autres. Ainsi, masquer des éléments et les suggérer autrement, cela fait aussi partie du travail de réalisateur.
Je crois que nous sommes chanceux, nous les développeurs indépendants, car nous pouvons utiliser de "vieilles" techniques et les remettre au goût du jour, afin de créer des expériences inattendues et surprenantes, et ce sans devoir espérer qu'elles plaisent au plus grand nombre.
La partie technique (enfin)
Je m'excuse pour ce long monologue non illustré qui vous a peut-être ennuyé, mais il me semblait important de bien expliquer mon point de vue et mes choix. Sans cela, parler des caméras n'aurait aucun sens. Ce n'est qu'un outil que l'on pose dans le décor pour avancer dans le jeu, et je ne pouvais pas vous faire passer de message précis en expliquant juste qu'on peut tourner ou déplacer une caméra, sans vous avoir dit avant quel est mon but à travers elles.
Maintenant que vous avez (je l'espère) compris l'importance que j'attache à ce qui est visible à l'écran (et ce qui ne l'est pas) voyons donc concrètement comment je crée et place les caméras dans Catyph.
Lorsque l'on crée une nouvelle caméra dans un environnement 3D, elle peut être placée n'importe où, à n'importe quel endroit de la scène 3dsmax.
Puisque je peux bouger une caméra à 360° sur les axes x, y et z : comment est-ce que je peux vraiment définir le bon angle de rotation et la bonne position dans l'espace ? Cela peut poser des difficultés parfois lorsque la scène est vaste, et il est nécessaire de prendre des points de repère pour savoir par où commencer.
On peut modifier un certain nombre de paramètres sur une caméra. Les plus courants sont :
- la rotation
- la position
- la distance focale et le champ de vision
Ainsi pour chaque vue du jeu, je dois tenir compte de ces paramètres et faire des choix. Qu'est-ce que je veux montrer au joueur ? Est-ce que c'est le chemin qu'il doit suivre, afin de le guider ? Ou est-ce que c'est la beauté d'un paysage, quelque chose que j'ai envie qu'il apprécie ?
Ou bien au contraire, est-ce qu'il y a quelque chose que je ne veux pas qu'il voie ? Soit parce que je considère que sous tel angle de vue ma modélisation 3D n'est pas belle, soit pour obliger le joueur à chercher un peu avant de trouver le bon chemin ?
C'est ce genre de questions que je me pose au moment de placer la caméra.
J'ai créé un petit exemple illustré dans un cas très simple, afin de montrer les principales étapes de placement d'une caméra :
Dans l'image du haut (avec une croix rouge), j'ai déplacé ma caméra depuis la vue précédente du jeu, et je l'ai grossièrement positionnée. Cela ne va pas du tout, c'est évident. L'horizon est complètement de travers (cela peut être un choix, mais ici ce n'est pas joli), et on ne voit pas la tour : on ne regarde que le chemin d'accès.
Dans un 2ème temps (croix orange) j'ai redressé la caméra pour la centrer d'avantage sur la tour. C'est déjà mieux, mais j'ai un nouveau problème : l'un des rochers au premier plan n'est pas beau sous cet angle et de toutes façons il semble bloquer l'accès, ce qui n'est pas très intéressant. Je ne peux pourtant pas le supprimer puisqu'il est visible de loin dans la vue précédente du jeu. Il faut donc manipuler la caméra une Nième fois.
Dans la 3ème image (symbole vert), j'ai trouvé ce qui me convenait le mieux. On voit la tour dans son ensemble avec ses pierres vertes étranges de chaque côté, le chemin semble directement accessible et l'horizon est droit (évitant une certaine sensation de roulis - non souhaité ici).
La dernière image montre le résultat dans le jeu.
Choisir le bon angle de vue est parfois relativement difficile ! Ici il n'y avait pas de difficulté, mais parfois les obstacles et les contraintes sont nombreux. Il peut y avoir des objets qui masquent la vue au premier plan, auquel cas il faudra animer leur opacité pour qu'ils "disparaissent" à l'approche de la caméra, sans pour autant que ce soit visible par le joueur. Et il y a évidemment la contrainte artistique, qui permet de transformer un angle de vue banal en quelque chose d'agréable à regarder. C'est la même chose qu'en photographie, les critères esthétiques sont les mêmes ! D'ailleurs il est recommandé d'avoir des notions de photographie lorsque l'on fait ce genre d'exercice en 3D : ça ne peut qu'augmenter le réalisme des images finales.
Caméra sur rails
L'autre grosse difficulté de cet exercice, c'est la nécessité de faire correspondre les vues à la perfection : c'est à dire pour que la position où l'on se tenait dans le jeu à l'instant précédent, soit logique par rapport à celle où l'on s'est rendu.
Le problème se pose principalement à cause des vidéos de transition qui illustrent les déplacements du héros. Sur un chemin symbolisé par 3 points A,B et C, il faut que l'image du point B corresponde très exactement à la dernière image de la vidéo de A vers B. De la même façon, elle doit correspondre à la première image de la vidéo de B vers C. Et ainsi de suite pour chaque vue.
Afin de résoudre ce problème et d'obtenir la continuité souhaitée dans le déplacement du joueur, j'ai choisi de faire des caméras sur rails. Cela signifie que tous les chemins sont prédéfinis, et que j'ai calculé l'ensemble des déplacements en une seule fois. Au lieu de créer le mouvement de A vers B, puis le mouvement de B vers C séparément, j'ai créé un seul long mouvement ABC (une séquence), que j'ai ensuite redécoupé.
Voici la séquence ABC complète :
Cette séquence est donc découpée pour le jeu de la façon suivante :
D'abord la vue A (point de départ)
Le déplacement vidéo de A vers B :
La vue B :
Le déplacement vidéo de B vers C :
et le point d'arrivée, la vue C :
Il faut bien comprendre que chaque déplacement se fait par un clic en cours de jeu, et que les images fixes sont les images où le joueur interagit (déplacements, actions, résolution d'énigmes...)
Et ainsi de suite ! Bien entendu ici il n'y a que 3 points de déplacement A, B et C, qui correspondent à 3 vues dans le jeu. Mais vous vous doutez bien que l'exercice est beaucoup plus complexe dans une région complète de Tytaah, où l'on visite de nombreuses vues et où les transitions de déplacement sont nombreuses.
Par la suite, le découpage final des séquences vidéos en vues et transitions est effectué dans After Effects. J'aurai donc des images fixes en JPG et des transitions vidéos en AVI pour construire le jeu, et je les placerai bout à bout dans le bon ordre avec le moteur du jeu : Visionaire Studio.
Mais avant de passer à cet exercice, nous verrons d'abord l'étape de rendu, ses contraintes, et comment faire quelque chose de joli à regarder. A la prochaine !
Merci d'être là pour nous prouver qu'on a des lecteurs <3
http://www.theicehouse.fr
Bon, il n'y aura pas de nouvelle partie du Making Of ce dimanche. J'avais presque fini de traduire la partie sur les caméras lorsque j'ai eu un gros bug qui a tout effacé ! Un peu dégouté quand même
http://www.theicehouse.fr
Tu m'étonnes ... Allez, courage !
Ouais, merci MaximeG C'est de ma faute aussi, je n'aurais pas dû faire la traduction directement sur le forum, mais plutôt dans un document texte. Je tape tout directement ici sur Indiemag, rien que pour vous, mais du coup quand j'ai un bug je dois tout retaper...
En attendant ça laisse le temps de lire les parties précédentes pour ceux qui seraient intéressés!
http://www.theicehouse.fr
Salut, juste pour dire que c'est vraiment SUPER INTÉRESSANT, et te féliciter pour cet énorme travail de traduction que tu réalises ici!! Un gros merci évidemment aussi à Simon, qui a en amont rédigé ce gros pavé éminemment instructif, très agréable à lire, et richement (et utilement) illustré!!
Nous ne l'avons pas encore dit mais nous suivons ce post avec assiduité ! C'est un magnifique making of comme on en voit peu. Les images et photos sont superbes et le processus est passionnant.
Merci de prendre le temps de rédiger et traduire tout cela, c'est un réel plaisir à lire et c'est toujours chouette d'entrer dans les coulisses d'un si bel univers.
C'est terrible cette histoire de bug qui a détruit tout ton travail... Courage !
@The_IceHouse : Oui, les backups m'ont sauvé quelques cheveux
Euh mais il me semble que c'est Simon qui écrit sur IndieMag vu que c'est un peu le fondateur de The Icehouse, c'est pour ça que ça m'étonne qu'il écrive "on" plutôt que "moi et les membres de mon collectif" quand il donne son avis sur un jeu référencé sur IndieMag, à moins que ça soit Yves qui poste les news du collectif, je sais pas
Waiting for the perfect RPG
Merci à tous, c'est très encourageant ! (vraiment, vraiment)
La suite arrivera très vite dans les jours qui viennent.
haha tu n'as pas tout à fait tort, mais c'est un compte dédié au collectif, alors ici on parle pour tout le monde, selon nos projets et notre actualité. On ne sait pas non plus si à l'avenir il n'y aura pas de nouveaux membres francophones chez Icehouse, ni de quelle façon nous choisirons de communiquer tous ensemble. On essaye surtout de différencier le collectif et les développeurs dans nos interventions. Là c'est le travail de Simon Says: Play! présenté par The Icehouse, mais à l'avenir ça pourrait être le travail de Ape Marina ou Luminy Studios par exemple. Cela dépend aussi de ce que nos développeurs prennent le temps de partager.
Chez Atelier Sentô on ne sait jamais si c'est Olivier ou Cécile qui répond C'est peut-être un yokai qu'ils ont ramené de leurs voyages !
http://www.theicehouse.fr
La dernière fois, nous avons vu comment les environnements 3D sont créés, en prenant en compte l'emplacement des énigmes. Si tout est prêt pour se promener sur Tytaah, il reste encore à préparer les caméras qui permettront vraiment de s'immerger dans les lieux.
Temps réel VS pré-calculé
Contrairement à ce que l'on a l'habitude de voir dans un jeu à la 1ère personne en 3D temps réel, où nous regardons ce que nous voulons à travers les yeux du héros, dans Catyph j'ai dû créer un système de caméras "sur rails" afin de reproduire une certaine continuité animée lors des déplacements dans des décors figés. Je pense que beaucoup de joueurs non habitués à ce type de jeu critiqueront mon choix de ne pas avoir eu recours à la 3D en temps réel, mais je l'assume pleinement.
C'est bien simple : puisque à ce jour je n'ai pas l'habitude de développer sous Unity ou UDK, et que je suis de toutes façons tout seul pour créer tous les graphismes du jeu, je suis persuadé que si je n'avais pas fait le choix du pré-calculé, je n'aurais sans doute jamais terminé le développement de ASA ou Catyph. Nous verrons aussi un peu plus loin que cet aspect de "tableau figé" créé dans ce style de jeu me plait particulièrement en tant que "réalisateur" qui tient la caméra.
Par ailleurs, puisque l'on parle de point & click, l'idée de se promener en temps réel est pour moi difficile à concevoir. Dans un point & click, on pointe et on clique : cela veut bien dire que le jeu est pensé pour être joué à la souris. Les exemples de Myst-like en temps réel que j'ai pu essayer (The Five Cores, Roonsehv...) ont tous de nombreuses qualités, mais je n'ai jamais pu me faire à leur gameplay. J'ai pourtant déjà passé de nombreuses heures dans des FPS ou des jeux tels que Skyrim ou Morrowind, mais dans un jeu d'aventure/énigmes, le déplacement au clavier tel qu'on le connait ne colle pas. Le gameplay est généralement nerveux : le héros avance brusquement dès que l'on tente d'avancer, la vitesse de déplacement ne me convient jamais (trop lent quand on marche, trop frénétique quand on court), et au final je ne me sens pas à l'aise pour résoudre les énigmes et découvrir le monde. Au contraire dans un jeu en pré-calculé (c'est à dire en 2D, dans le fond), on a tout le temps d'anticiper ses mouvements et de réfléchir à ses prochaines actions.
Gameplay archaïque ? Chacun se fera son avis : je sais d'avance que si je devais utiliser un moteur 3D temps réel, j'aurais un énorme travail à effectuer sur le gameplay avant d'être réellement convaincu. Cela ne veut pas dire que je souhaite travailler en pré-calculé jusqu'à la fin de mes jours. Un jeu tel qu'ASA ou Catyph en temps réel me plairait sans doute particulièrement, mais je dois d'abord apprendre à utiliser correctement les moteurs qui existent, et proposer un gameplay qui puisse satisfaire les différents types de joueurs. L'une de mes idées serait de conserver les déplacements traditionnels au clavier pour les joueurs qui y tiennent particulièrement, mais d'ajouter des pointeurs dans les décors qui permettent de se "téléporter" à la vue suivante, comme on le ferait dans un Myst traditionnel, rendant le jeu entièrement jouable à la souris pour ceux qui le souhaient. C'est un mécanisme de gameplay que j'aimerais beaucoup expérimenter dans un prochain jeu (et pourquoi pas avec l'Oculus en prime ?). Je n'en suis pas là, et tout dépendra du succès de mes prochains jeux !
Pour le moment, le gameplay de Catyph doit prendre en compte les contraintes suivantes :
Ce dernier point a retenu toute mon attention. Même s'il est vrai qu'on ne peut pas définir Catyph (ni même ASA, Myst ou Rhem...) comme étant des films interactifs, ce concept d'immersion cinématographique n'est pas non plus totalement injustifié :
Cela fait des Myst-like des jeux très personnels, où les auteurs/développeurs travaillent les détails des environnements pour reproduire le monde qu'ils ont imaginé. En empêchant le joueur de tourner la tête et d'aller là où il veut, et en lui montrant une image précise, celui-ci est immédiatement impliqué dans la vision de l'auteur. Et voilà que l'on rejoint la définition même d'un Myst-like : ce sont des jeux où le joueur est piégé dans un lieu inconnu, créé par un autre. C'est comme si notre esprit était projeté dans le corps d'un individu lambda, à des années-lumières de la Terre, et que l'on pouvait prendre les décisions à travers lui, sans être vraiment totalement maître de ce qu'il se passe autour de nous.
L'imagination et les rêves
Ce qui me semble le plus efficace pour expliquer l'intérêt principal des Myst-like (à savoir l'immersion et l'exploration d'un monde "2D"), c'est de les comparer à l'expérience que l'on peut avoir avec des livres.
Dans un livre, il n'y a habituellement pas d'images, ce n'est que du texte. Beaucoup de personnes boudent les livres pour cette raison : depuis l'arrivée de la télévision et, mieux encore, des ordinateurs, nous vivons dans une société d'images, où nous avons pris l'habitude d'associer tout ce qui nous entoure de visuels en tous genres. Pourtant, lorsqu'un film sort au cinéma et qu'il s'agit d'un film inspiré d'un livre célèbre, on peut remarquer quelque chose : même si le film en lui-même est excellent, la plupart des personnes qui ont adoré le livre original feront part d'une certaine déception. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'ils ne voyaient pas le héros ainsi, ou parce que les lieux ne correspondent pas vraiment à ce qu'ils pensaient.
On peut trouver de nombreuses raisons pour expliquer que certaines personnes préfèrent un livre à son adaptation en film, mais la plupart du temps, cela se résume à une seule chose : le pouvoir de l'imagination.
Dans Catyph et ASA (et les autres jeux du genre) l'imagination a bien plus de place que dans un jeu où l'on nous montre tout. Ce que je veux dire ici, c'est que même si les graphismes pré-calculés peuvent d'abord sembler restrictifs (je reconnais moi-même avoir été frustré quand j'ai joué à Riven pour la première fois), hé bien si l'on prend du recul et que l'on réalise que ce type de jeu n'a pas vocation à faire comme les autres, alors on comprend l'importance et l'impact de chaque image. Tout ce qui n'est pas visible en tournant la tête (qui est hors du champ de vision de la caméra), peut alors être inventé par le joueur, et bien souvent c'est un processus inconscient. Imaginez simplement le monde par vous-même !
A mes yeux c'est important, tout comme ça l'est dans d'autres créations artistiques. Ce qui fait qu'une peinture ou une photo nous touche particulièrement, c'est ce qu'elle véhicule comme émotions, et cela grâce à notre imagination : en nous faisant revivre une scène passée, ou en inventant un monde abstrait qui nous parle. Tout le monde se fiche que les tableaux de Monet soient des images fixes : leur intérêt est ailleurs, et ça n'en fait pas moins des œuvres intéressantes à regarder. Je crois que cela est vrai dans le cas de jeux comme Myst, ASA et Catyph. Cette apparente restriction de gameplay devrait devenir une porte ouverte, au rêve par exemple. C'est ainsi que j'ai compris l'intérêt de Riven en y jouant autrefois. Comme je l'ai dit j'étais parfois déçu de me déplacer dans des images fixes, mais l'instant d'après, j'avais en fait reconstruit les éléments manquants du décor dans ma tête. Les oiseaux que j'entendais dans la bande-son et qui n'étaient pas visibles à l'écran, c'était pour moi les oiseaux inconnus d'un monde étrange, qui tournoyaient haut dans le ciel au-dessus de la mer, et qui restaient inaccessibles malgré mes efforts. Si l'on m'avait montré des mouettes en 3D, je n'aurais pas eu le même ressenti : j'aurais juste vu des mouettes comme tant d'autres. Ainsi, masquer des éléments et les suggérer autrement, cela fait aussi partie du travail de réalisateur.
Je crois que nous sommes chanceux, nous les développeurs indépendants, car nous pouvons utiliser de "vieilles" techniques et les remettre au goût du jour, afin de créer des expériences inattendues et surprenantes, et ce sans devoir espérer qu'elles plaisent au plus grand nombre.
La partie technique (enfin)
Je m'excuse pour ce long monologue non illustré qui vous a peut-être ennuyé, mais il me semblait important de bien expliquer mon point de vue et mes choix. Sans cela, parler des caméras n'aurait aucun sens. Ce n'est qu'un outil que l'on pose dans le décor pour avancer dans le jeu, et je ne pouvais pas vous faire passer de message précis en expliquant juste qu'on peut tourner ou déplacer une caméra, sans vous avoir dit avant quel est mon but à travers elles.
Maintenant que vous avez (je l'espère) compris l'importance que j'attache à ce qui est visible à l'écran (et ce qui ne l'est pas) voyons donc concrètement comment je crée et place les caméras dans Catyph.
Lorsque l'on crée une nouvelle caméra dans un environnement 3D, elle peut être placée n'importe où, à n'importe quel endroit de la scène 3dsmax.
Puisque je peux bouger une caméra à 360° sur les axes x, y et z : comment est-ce que je peux vraiment définir le bon angle de rotation et la bonne position dans l'espace ? Cela peut poser des difficultés parfois lorsque la scène est vaste, et il est nécessaire de prendre des points de repère pour savoir par où commencer.
On peut modifier un certain nombre de paramètres sur une caméra. Les plus courants sont :
- la rotation
- la position
- la distance focale et le champ de vision
Ainsi pour chaque vue du jeu, je dois tenir compte de ces paramètres et faire des choix. Qu'est-ce que je veux montrer au joueur ? Est-ce que c'est le chemin qu'il doit suivre, afin de le guider ? Ou est-ce que c'est la beauté d'un paysage, quelque chose que j'ai envie qu'il apprécie ?
Ou bien au contraire, est-ce qu'il y a quelque chose que je ne veux pas qu'il voie ? Soit parce que je considère que sous tel angle de vue ma modélisation 3D n'est pas belle, soit pour obliger le joueur à chercher un peu avant de trouver le bon chemin ?
C'est ce genre de questions que je me pose au moment de placer la caméra.
J'ai créé un petit exemple illustré dans un cas très simple, afin de montrer les principales étapes de placement d'une caméra :
Dans l'image du haut (avec une croix rouge), j'ai déplacé ma caméra depuis la vue précédente du jeu, et je l'ai grossièrement positionnée. Cela ne va pas du tout, c'est évident. L'horizon est complètement de travers (cela peut être un choix, mais ici ce n'est pas joli), et on ne voit pas la tour : on ne regarde que le chemin d'accès.
Dans un 2ème temps (croix orange) j'ai redressé la caméra pour la centrer d'avantage sur la tour. C'est déjà mieux, mais j'ai un nouveau problème : l'un des rochers au premier plan n'est pas beau sous cet angle et de toutes façons il semble bloquer l'accès, ce qui n'est pas très intéressant. Je ne peux pourtant pas le supprimer puisqu'il est visible de loin dans la vue précédente du jeu. Il faut donc manipuler la caméra une Nième fois.
Dans la 3ème image (symbole vert), j'ai trouvé ce qui me convenait le mieux. On voit la tour dans son ensemble avec ses pierres vertes étranges de chaque côté, le chemin semble directement accessible et l'horizon est droit (évitant une certaine sensation de roulis - non souhaité ici).
La dernière image montre le résultat dans le jeu.
Choisir le bon angle de vue est parfois relativement difficile ! Ici il n'y avait pas de difficulté, mais parfois les obstacles et les contraintes sont nombreux. Il peut y avoir des objets qui masquent la vue au premier plan, auquel cas il faudra animer leur opacité pour qu'ils "disparaissent" à l'approche de la caméra, sans pour autant que ce soit visible par le joueur. Et il y a évidemment la contrainte artistique, qui permet de transformer un angle de vue banal en quelque chose d'agréable à regarder. C'est la même chose qu'en photographie, les critères esthétiques sont les mêmes ! D'ailleurs il est recommandé d'avoir des notions de photographie lorsque l'on fait ce genre d'exercice en 3D : ça ne peut qu'augmenter le réalisme des images finales.
Caméra sur rails
L'autre grosse difficulté de cet exercice, c'est la nécessité de faire correspondre les vues à la perfection : c'est à dire pour que la position où l'on se tenait dans le jeu à l'instant précédent, soit logique par rapport à celle où l'on s'est rendu.
Le problème se pose principalement à cause des vidéos de transition qui illustrent les déplacements du héros. Sur un chemin symbolisé par 3 points A,B et C, il faut que l'image du point B corresponde très exactement à la dernière image de la vidéo de A vers B. De la même façon, elle doit correspondre à la première image de la vidéo de B vers C. Et ainsi de suite pour chaque vue.
Afin de résoudre ce problème et d'obtenir la continuité souhaitée dans le déplacement du joueur, j'ai choisi de faire des caméras sur rails. Cela signifie que tous les chemins sont prédéfinis, et que j'ai calculé l'ensemble des déplacements en une seule fois. Au lieu de créer le mouvement de A vers B, puis le mouvement de B vers C séparément, j'ai créé un seul long mouvement ABC (une séquence), que j'ai ensuite redécoupé.
Voici la séquence ABC complète :
Cette séquence est donc découpée pour le jeu de la façon suivante :
D'abord la vue A (point de départ)
Le déplacement vidéo de A vers B :
La vue B :
Le déplacement vidéo de B vers C :
et le point d'arrivée, la vue C :
Il faut bien comprendre que chaque déplacement se fait par un clic en cours de jeu, et que les images fixes sont les images où le joueur interagit (déplacements, actions, résolution d'énigmes...)
Et ainsi de suite ! Bien entendu ici il n'y a que 3 points de déplacement A, B et C, qui correspondent à 3 vues dans le jeu. Mais vous vous doutez bien que l'exercice est beaucoup plus complexe dans une région complète de Tytaah, où l'on visite de nombreuses vues et où les transitions de déplacement sont nombreuses.
Par la suite, le découpage final des séquences vidéos en vues et transitions est effectué dans After Effects. J'aurai donc des images fixes en JPG et des transitions vidéos en AVI pour construire le jeu, et je les placerai bout à bout dans le bon ordre avec le moteur du jeu : Visionaire Studio.
Mais avant de passer à cet exercice, nous verrons d'abord l'étape de rendu, ses contraintes, et comment faire quelque chose de joli à regarder. A la prochaine !
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